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Amos prophète original

Amos 1.1-5 (S21)

1  Paroles d’Amos, l’un des bergers de Tekoa, visions qu’il a eues sur Israël durant les règnes d’Ozias sur Juda et de Jéroboam, fils de Joas, sur Israël, deux ans avant le tremblement de terre.

2  Il dit: « De Sion l’Eternel rugit, de Jérusalem il fait entendre sa voix. Les pâturages des bergers sont dans le deuil, et le sommet du Carmel est desséché. »

3  Voici ce que dit l’Eternel: A cause de trois crimes de Damas, même de quatre, je ne reviens pas sur ma décision. Parce qu’ils ont écrasé Galaad sous des traîneaux de fer, 4  j’enverrai le feu dans la maison de Hazaël, et il dévorera les palais de Ben-Hadad.

5  Je briserai les verrous de Damas….»

 La prophétie d’Amos se poursuit dans les mêmes termes dans ce premier chapitre (et au début du chap. 2) ; elle concerne presque tous les royaumes environnants (ou cités-Etats) : Gaza, Tyr, Edom, Ammon, Moab…

Amos évoque enfin la situation de son propre pays, d’abord le royaume de Juda, au sud (juste deux versets 2.4-5) et surtout le royaume d’Israël au nord, auquel il va adresser un long discours de la part de Dieu, en plusieurs parties, jusqu’à la fin du chapitre 9, soit la quasi-totalité du livre que nous avons dans la Bible.

En lisant le livre d’Amos, ce « petit prophète » (livre court), qui a vécu comme Michée, Osée, Esaïe, au 8e siècle av. Jésus, je me suis demandé ce que je pourrais dire de différent par rapport à ce que nous avons déjà vu, par exemple, avec Michée et Osée.

Nous retrouvons en effet à peu près toujours le même message, les mêmes « reproches », les mêmes « menaces » ou les mêmes « jugements » de Dieu, qu’on peut résumer en trois points :

– Dieu sanctionne d’abord les nations voisines d’Israël, surtout à cause de leurs crimes de guerre, leur violence excessive, sans pitié, leurs trahisons, qui sont comme les mauvais fruits de peuples qui ne le connaissent pas.

– Aux peuples d’Israël et de Juda, Dieu reproche d’avoir rompu l’alliance qu’il a conclue avec eux, de mépriser et de transgresser sa loi, à commencer par le fait de rendre un culte à d’autres dieux, et de tolérer des injustices qui se traduisent par une certaine violence sociale.

– Dieu charge donc ses prophètes de dénoncer les abus de pouvoir de la part des dirigeants politiques et religieux à l’encontre des plus faibles, des plus vulnérables, les pauvres, les malades, ceux qui sont seuls (veuves et orphelins), les étrangers en situation précaire, les « petits », tous ceux qui n’ont pas de pouvoir.

Ils sont également chargés de dénoncer la corruption des élites (toujours religieuses et politiques), qui se complaisent non seulement dans cet abus de pouvoir, mais aussi dans une débauche qui fait scandale.

Mais l’idolâtrie et la débauche sont aussi le fait du peuple d’Israël dans son ensemble, des plus pauvres aux plus riches, et Dieu condamne enfin tous ces « désordres », qui montrent que son peuple tout entier refuse de vivre avec lui une relation juste, inspirée par l’amour, comme au sein d’un couple, un amour pur et sincère (comme nous l’avons vu avec le prophète Osée).

C’est pourquoi, le Seigneur charge aussi ses porte-paroles, ses prophètes, d’annoncer son jugement, son verdict et la peine qui va suivre, comme dans un procès à la suite d’une trahison, d’une rupture de contrat de la part de l’une des deux parties.

Cette peine sera appliquée très concrètement au peuple d’Israël dans son histoire collective, et cela de différentes manières, par des fléaux naturels incontrôlables (sécheresse, invasion d’insectes, tremblement de terre, etc.), des conflits politiques, des invasions étrangères, et finalement par l’exil dans le pays des envahisseurs.

C’est ce qui s’est réellement produit au 8e siècle pour le royaume du nord (Israël), puis au 6e siècle pour le royaume du sud (Juda).

Enfin, les prophètes (dont Amos), sont chargés d’annoncer aussi le pardon de Dieu, sa consolation après le jugement, la restauration, le retour après l’exil et le rétablissement du royaume d’Israël, mais bien sûr à condition que le peuple de Dieu renonce à faire le mal, qu’il « revienne » à Dieu pour le servir et l’adorer lui seul, dans une relation juste et inspirée par l’amour…

Rien donc de très « nouveau » sous le soleil (prophétique) en lisant le prophète Amos, qui dit à peu près les mêmes choses, au même moment et au même endroit, que Michée, Osée, Esaïe, et certainement d’autres prophètes, dont on n’a pas conservé les écrits, pour toutes sortes de raisons…

Mais Amos est un prophète « à part », ou en tout cas un prophète original.

Amos 7

14 « Je ne suis pas prophète, ni fils de prophète, mais je suis berger et je cultive des sycomores. 15  L’Eternel m’a pris derrière le troupeau et c’est lui qui m’a dit: ‘Va prophétiser à mon peuple, Israël!’ »

Amos se distingue des autres prophètes sur plusieurs points.

Tout d’abord, il n’est pas issu d’une famille de prophètes, et il n’est apparemment pas lié à un groupe bien défini de prophètes ; il n’a aucun rôle dans la vie religieuse ou politique d’Israël.

Au contraire, il se présente lui-même comme un simple agriculteur. C’est un éleveur de petit bétail (le terme est assez général), donc probablement un berger, mais c’est aussi un arboriculteur, il cultive le figuier sycomore (une des 700 espèces !), pour son propre compte ou pour celui d’un autre propriétaire.

Amos est spécialisé dans une pratique très particulière. Dans la Bible, le verbe utilisé dans ce texte n’apparaît que dans ce passage, et il n’est donc pas facile à comprendre ni à traduire.

Il peut désigner la pratique de pincer (ou de couper) la tige au niveau du bourgeon terminal, pour faire naître de nouveaux rameaux porteurs de fruits, et donc pour avoir une récolte plus abondante de figues.

Mais ce verbe se rapporte sans doute davantage au fait d’inciser la figue du sycomore, afin qu’elle murisse plus rapidement et qu’elle soit meilleure, plus sucrée (l’incision permet de faire couler un suc – lait – amer, et elle permet surtout de libérer l’éthylène enfermé dans le fruit, qui est le principal agent de maturation, d’autant plus efficace que les figues du sycomore sont très rapprochées les unes des autres) ; ces figues, qui servent habituellement de nourriture pour le bétail (ce qui explique peut-être aussi la double activité d’Amos), peuvent être alors consommées aussi par les hommes.

Quoi qu’il en soit, Amos voit plus loin que la plupart de ses contemporains, non seulement parce qu’il est inspiré par Dieu, mais aussi grâce son activité de berger et de cultivateur : il doit prendre soin de ses brebis pour qu’elles se reproduisent au mieux ; et il doit aussi intervenir sur ses figuiers, afin qu’ils soient plus productifs et que les fruits soient meilleurs.

Je note un détail important dans la prophétie d’Amos, dès le premier verset du premier chapitre, où il est précisé que le prophète a reçu sa première vision « deux ans avant le tremblement de terre ».

Le figuier, dans la Bible, est parfois pris comme un symbole de paix et de prospérité ; on dit par exemple, pour illustrer le bonheur suprême d’un individu (et de sa famille) que « chacun a sa vigne et son figuier », ce qui est une manière de dire qu’il a tout ce qu’il faut pour vivre ! (Esaïe 36.16, Michée 4.4 ; 1 Rois 4.25).

Et c’était le cas du temps d’Amos : ce début du 8e siècle était une période prospère (je l’ai déjà mentionné plusieurs fois), tout semblait aller plutôt bien pour le peuple d’Israël.

Si Amos a exercé ce métier, c’est qu’il y avait de nombreux sycomores, et que leur entretien nécessitait une main d’œuvre spécialisée qui pouvait vivre de cette activité saisonnière, en complément d’un autre travail.

Malheureusement, l’orage commençait à gronder, et on pouvait déjà percevoir, au moins si l’on était prophète, les signes avant-coureurs d’une catastrophe.

L’Assyrie voisine devenait de plus en plus puissante et menaçait sérieusement son proche voisin à l’ouest ; les prophètes comme Amos, Michée, Esaïe, annoncent tous que cette invasion sera inéluctable et qu’elle sera comme un « jugement de Dieu » sur son peuple…

Amos est le seul à utiliser ici une expression très particulière (encore un trait original de ce prophète !) : au premier chapitre, il commence ses prophéties sur chaque nation par : « A cause de trois crimes, et même de quatre… », puis il prononce le jugement de Dieu sur ces crimes de guerre.

C’est comme s’il disait, de la part de Dieu : « Je me suis montré patient, une fois, deux fois, trois fois, mais maintenant, cette quatrième fois, c’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase, je vais sévir… Je ne vais plus supporter ces délits, ces infractions à mes lois » (sous-entendu « car je suis un Dieu juste et je ne tolère pas le mal… »).

En d’autres termes : « Il y a des limites à ma patience… »

Amos a prié pour son peuple, lorsqu’il était menacé par une invasion de sauterelles (ou de criquets pèlerins) qui mangeaient la future récolte.

Et Dieu a répondu à sa prière, il a manifesté son pardon, les sauterelles ont cessé de faire des dégâts (chapitre 7). Mais apparemment, cela n’a pas suffi pour que le peuple de Dieu change d’attitude…

Amos 1

2 « De Sion l’Eternel rugit, de Jérusalem il fait entendre sa voix. Les pâturages des bergers sont dans le deuil, et le sommet du Carmel est desséché.»

Le vocabulaire utilisé dans le premier verset suggère un avertissement semblable au rugissement d’un lion, comme si ce lion était sur le point de bondir sur sa proie.

L’image s’applique alors à Israël (le royaume du nord) : Amos annonce que le Carmel (montagne bien arrosée) va connaître une période de sécheresse et les bergers seront privés de pâturages, ils seront tristes et abattus, comme lors d’un deuil…

On retrouve là notre prophète-berger, qui sait bien quelles conséquences peut avoir la conduite déréglée des dirigeants et même du peuple tout entier. Il sait que cela va entraîner bien des malheurs, y compris pour lui-même, très concrètement, en tant que berger (on ne soulignera jamais assez le lien entre la relation – l’obéissance – à Dieu et le « bien-être » de l’environnement…)/

Alors que pouvons-nous retirer de la lecture, aujourd’hui, de ce prophète original, de ce berger et cultivateur qui parle au nom du Seigneur aux diverses nations environnantes ainsi qu’à son peuple ?

Je ne veux pas, bien sûr, établir de rapport trop facile, trop direct, avec notre situation actuelle, même si elle ressemble en bien des points à celle du temps d’Amos.

C’est toujours risqué d’interpréter certains événements comme cette invasion de criquets pèlerins en Afrique de l’est, en ce moment même, sur des millions d’hectares ; ou encore cette fameuse grippe qui se répand en Chine et dans le monde et qui affecte et tue de nombreuses personnes ; et bien d’autres événements tragiques, comme le réchauffement climatique…

Les chrétiens ont été tentés, tout au long de l’histoire, de voir ainsi dans les événements les plus sombres les signes avant-coureurs de « la fin », du retour du Seigneur, du jugement de Dieu… Qu’aurions-nous pensé, par exemple, lors de la peste noire, en 1348, qui a décimé probablement un tiers de la population européenne (et ailleurs dans le monde) ? Et à de nombreuses reprises tout au long de l’histoire (le génocide nazi pendant la 2ème Guerre mondiale, et plus récemment encore, les tremblements de terre et tsunamis spectaculaires et meurtriers en Asie ou à Haïti, etc.)

Mais il reste vrai que l’on peut rester attentif, à toute époque, aux avertissements qui nous sont donnés dans la Bible, non pour nous faire peur, mais au contraire pour nous aider à être prêts à faire face à toute situation, bonne ou mauvaise, et donc à rester vigilant et en paix, notamment en cultivant notre relation avec Dieu.

Lorsque j’ai relu ce prophète, deux textes du Nouveau Testament me sont revenus en mémoire.

D’abord, la prophétie de Jésus sur les grands bouleversements qui accompagneront le jugement de Dieu sur son peuple, du temps des Romains qui détruiront Jérusalem et le temple, ce qui s’est effectivement passé en 70-73 et en 135.

Cette défaite des Juifs a eu pour conséquence leur dispersion parmi les peuples païens, avec toutes les souffrances que cet exil a occasionnées pour eux (et hélas aussi, au cours des siècles, de la part de soi-disant chrétiens…).

Mais cette prophétie de Jésus a une portée plus large, elle évoque également un jugement général, sur tous les peuples, qui surviendra à « la fin des temps » (qui ont commencé en fait avec la résurrection de Jésus), et ce jugement aura lieu lors de son retour, dont personne ne connaît le jour (voir Matthieu 24 et Luc 21).

Jésus prend alors comme image le figuier (sycomore ou autre), pour illustrer les signes annonciateurs de son retour, de son jugement sur le monde.

Matthieu 24

32  « Comprenez l’enseignement que donne le figuier : dès que la sève circule dans ses branches et que ses feuilles poussent, vous savez que la bonne saison est proche. 33  De même, quand vous verrez tout cela (les signes annonciateurs de son retour), sachez que l’événement est proche, qu’il va se produire (ou : que le Fils de l’homme est à la porte, prêt à « entrer » dans son royaume…)

Puis j’ai pensé aux avertissements de l’apôtre Pierre, qui résument, il me semble, l’essentiel de ce que Jésus veut enseigner à ses disciples pour les préparer à vivre les temps difficiles qui précèdent le jugement de Dieu sur le monde :

2 Pierre 3 (version Semeur, extraits) :

1  Mes chers amis (bien-aimés), voici déjà la deuxième lettre que je vous écris ; dans l’une comme dans l’autre, je cherche à stimuler en vous une saine manière de penser en vous rappelant l’enseignement que vous avez reçu.

2  Souvenez-vous, en effet, des paroles dites autrefois par les saints prophètes, ainsi que du commandement du Seigneur et Sauveur que vos apôtres vous ont transmis.

3  Sachez tout d’abord que, dans les derniers jours, des moqueurs viendront, qui vivront au gré de leurs propres désirs. Ils tourneront votre foi en ridicule en disant :

4  « Eh bien, il (Jésus) a promis de venir, mais c’est pour quand ? Nos ancêtres sont morts et depuis que le monde est monde, rien n’a changé ! » […]

8  Mais il y a un fait que vous ne devez pas oublier, mes chers amis (bien-aimés) : c’est que, pour le Seigneur, un jour est comme mille ans et mille ans sont comme un jour.

9  Le Seigneur n’est pas en retard dans l’accomplissement de sa promesse, comme certains se l’imaginent, il fait simplement preuve de patience à votre égard, car il ne veut pas qu’un seul périsse. Il voudrait, au contraire, que tous parviennent à se convertir. 10  Mais le jour du Seigneur viendra comme un voleur…

14  C’est pourquoi, mes chers amis (bien-aimés), dans cette attente, faites tous vos efforts pour que Dieu vous trouve purs et irréprochables à ses yeux, dans la paix qu’il donne.

18  … progressez sans cesse dans la grâce (seul moyen d’être pur et irréprochable) et dans la connaissance (idem) de notre Seigneur et Sauveur Jésus-Christ. A lui soit la gloire dès maintenant et pour l’éternité. Amen. 

Luc 13 (contexte : tour écroulée et crime de Ponce Pilate : les « pécheurs » tués dans ces circonstances ne sont pas plus coupables que d’autres, et ceux qui sont témoins de ces faits sont encouragés par Jésus à « revenir à Dieu »…)

6  Jésus leur dit cette parabole : « Un homme avait un figuier planté dans sa vigne. Il vint y chercher des figues, mais n’en trouva pas.

7  Il dit alors au vigneron : “Regarde : depuis trois ans je viens chercher des figues sur ce figuier et je n’en trouve pas. Coupe-le donc ! Pourquoi occupe-t-il du terrain inutilement ?”

8  Mais le vigneron lui répondit : “Maître, laisse-le cette année encore ; je vais creuser la terre tout autour et j’y mettrai du fumier.

9  Ainsi, il donnera peut-être des figues l’année prochaine ; sinon, tu le feras couper.” »

2 Pierre 3

17  Bien-aimés, vous voilà prévenus. Prenez garde de ne pas vous laisser entraîner par l’égarement des hommes vivant sans respect pour Dieu et de perdre ainsi la position solide que vous occupez.

18  Au contraire, progressez sans cesse dans la grâce et dans la connaissance de notre Seigneur et Sauveur Jésus-Christ. A lui soit la gloire dès maintenant et pour l’éternité. Amen.